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Dorothée, bouc émissaire

  • lesanneesrecre
  • 27 juin
  • 6 min de lecture

Un « bouc émissaire » par définition est un individu, un groupe, une organisation, choisi pour endosser une responsabilité ou expier une faute pour laquelle il est, totalement ou partiellement, innocent. Et c’est bien de cela dont il s’agit. Dorothée a toujours fait coûler beaucoup d’encre et parfois pour de mauvaises raisons.

Loin de moi l’envie d’écrire un article polémique mais puisque ce site se veut le témoin d’une époque et notamment celle pendant laquelle Dorothée a fait figure de proue, il me semble bienvenu de retracer quelques faits au lendemain de la diffusion d’un documentaire dans lequel il est fait mention de quelques clips de l’artiste. Je précise que les documents figurant dans cet article ne le sont qu’à titre illustratif.


Les clichés racistes dans la chanson « Attention danger » de Dorothée

« Si les représentations des femmes n’étaient franchement pas terribles (notamment au sein des aventures des Musclés), celles des personnes racisées aussi. Dans le clip « Attention danger », sorti en 1988, Dorothée est dans la jungle entourée d’hommes noirs habillés de pagnes et d’os dans les cheveux… Des stéréotypes profondément racistes qui ne passent pas aujourd’hui. Et c’est sans parler du clip de « La machine avalé »… Les Noir.e.s, des personnes « sauvages », vraiment ? Si dans les années 80, le temps des colonies était déjà loin derrière nous, les clichés racistes nous collaient encore à la peau. »

Par Nadia Vaillant (29/08/2021 sur Au féminin.com)


Quand Dorothée s’entourait de « sauvages »

« La Machine avalé » est une chanson interprétée par Dorothée et diffusée à partir de 1988. Dans le texte, écrit par Jean-François Porry (pseudonyme de Jean-Luc Azoulay, le fondateur d’AB Productions), la nature, les animaux et les hommes subissent les affres d’une machine qui engloutit tout sur son passage. Dans le clip, Dorothée se retrouve dans la jungle. Elle est accompagnée par trois acteurs noirs, qui interprètent les chœurs de la chanson (“Ouah, ouah, ouah, ouah”). Quand soudain, ils décident de la capturer et de la faire cuire dans une marmite au cours d’une scène qui reprend certains des clichés du temps de l’empire colonial français. »

par Nicolas Enault (01/09/2017 pour France TV Info)


Il convient de replacer cette scène dans le contexte de son époque. Le gag de la marmite, souvent associé à la caricature des « cannibales », était un ressort comique très répandu dans la culture populaire de l'époque. S’en prendre à Dorothée est donc un peu facile, tant ce genre de représentation était alors omniprésent, y compris dans des productions internationales à gros budget.


Pour exemple, dans Allan Quatermain et les Mines du roi Salomon (1985), les personnages incarnés par Richard Chamberlain et Sharon Stone sont eux aussi capturés par une tribu fictive et menacés d’être cuits dans une marmite. Faut-il en conclure que ces acteurs propageaient sciemment des clichés racistes ? Peu s’y risqueraient, tant il est clair qu’ils s’inscrivaient dans un imaginaire hérité du cinéma d’aventure, lui-même nourri de représentations coloniales banalisées à l’époque.


Cela n’excuse en rien ces stéréotypes, mais permet de les analyser dans une perspective historique plutôt que moralisante. Ce sont moins les intentions des artistes qu’il faut interroger, que les codes culturels qu’ils reproduisaient sans toujours les remettre en question.

En 1932, même Mickey a le droit à son bain bouillonnant.

Rokhaya Diallo, née en 1978 à Paris, journaliste et auteure, militante féministe et antiraciste se confie à Oumar Diawara. Alors qu’elle fait partie des premières fans de Dorothée et de ses émissions, elle se souvient de ces images caricaturales que l’on pouvait voir dans les clips de la chanteuse. ( Interview complète ICI)


A l’occasion d’une soirée spéciale sur France 2 le mardi 18 janvier 2022, le nom de l’animatrice préférée des quadras revient encore dans le débat. Le samedi précédent Ali Badou reçoit l’écrivain Alain Mabanckou et la réalisatrice Aurélia Perreau pour les documentaires « Noirs de France » et « Le village Bamboula » qui seront diffusés sur France 2.


S’il est vrai qu’aujourd’hui de telles images ne seraient plus admises à la télévision, il faut rappeler que les clips dont on parle ont déjà presque 40 ans.

C’était une époque où, à la télévision, presque tout était encore permis. Stéphane Collaro, en prime time, présentait des femmes nues à l’antenne, mais aussi un personnage noir ricannant pour introduire de fausses publicités, elles-mêmes mettant en scène un autre personnage noir, nommé « Monsieur Con », se promenant en slip façon Tarzan.


Un an plus tôt, une autre animatrice de « Récré A2 », Marie Dauphin chantait « Y a des Papous » dans un clip où les éboueurs de Paris se transforment en indigènes. Bien sûr, la concernée se défend réfutant toutes formes de racisme dans son intention uniquement artistique.




Que dire des sketchs de Michel Leeb ? Son célèbre numéro intitulé « L’Africain », créé au début des années 80, a largement contribué à son succès. Il faisait se tordre de rire des salles entières, en reproduisant pourtant des stéréotypes raciaux aujourd’hui jugés profondément offensants. Aujourd’hui, un tel sketch ne passerait plus.


Mais à l’époque, les clichés raciaux étaient omniprésents, y compris dans la publicité. En 1980, les biscuits Papous s’inscrivaient dans la même logique que d’autres produits aux noms ou visuels problématiques : les bonbons Tête de nègre, le chocolat Banania, ou encore les célèbres gâteaux au chocolat Bamboula, lancés en 1987 par la marque Saint Michel, qui pensait alors créer un nouveau héros pour les enfants.

Le garçonnet imaginé par Jean Denis remporta un vif succès si bien que St Michel déclina des mini bandes dessinées à l’effigie du personnage qui vivait des aventures à Bambouland entouré de sa famille et ses amis. La biscuiterie a aussi édité un magazine, « Le journal de Bamboula », avec des reportages, des BD et des jeux concours mais aussi de nombreux produits dérivés. Jusqu’en 1994, le petit Bamboula ravit les enfants. Mais lorsque Saint Michel sponsorise le « Village Bamboula », la polémique éclate.Pourtant autorisé par les pouvoirs publics, ce parc d’attraction d’un nouveau genre, installé dans un zoo créé deux ans plus tôt près de Nantes, proposait aux visiteurs de découvrir 25 hommes, femmes et enfants originaires de Côte d’Ivoire, vêtus de costumes traditionnels, vivant au milieu de cases et d’animaux de la savane.

Des artisans et danseurs s’y produisaient tout au long de la journée, sous les yeux des touristes. Mais l’exploitation du parc et de ses « habitants » ne résistera pas longtemps à l’indignation suscitée. De nombreuses plaintes furent déposées pour non-respect du Code du travail et des droits de l’homme. Le parc ferme rapidement ses portes, emporté par une vague de critiques qui dénonce ce que beaucoup ont qualifié de « zoo humain ».


Si les enfants que nous étions ne pouvaient pas se rendre compte des méfaits de ces représentations caricaturales — souvent utilisées sous couvert d’humour —, il faut bien admettre qu’aujourd’hui, certaines de ces images nous mettent mal à l’aise. Le fait que ce type d’humour ait été courant à l’époque n’en atténue pas pour autant la portée raciste — si racisme il y a. Est-ce que leurs auteurs pensaient à mal ? Sûrement pas. Espérons que non.

Mais si certains se disent choqués par ces caricatures, faut-il pour autant bannir toute forme de dérision ? Jusqu’où ira-t-on ? Les albums de Tintin sont censurés, des titres de grands classiques sont rebaptisés — Les Dix Petits Nègres d’Agatha Christie s’intitule désormais Ils étaient dix —, et même Disney range certains de ses dessins animés dans des rubriques « pour adultes » afin de prévenir le public. En 2015, nous étions tous « Charlie », revendiquant le droit au blasphème et à la liberté d’expression. Qu’en est-il aujourd’hui de la liberté d’humour ?

Toujours est-il que faire porter le chapeau à Dorothée, 35 ans après les faits, c’est peut-être un peu excessif, non ? VSD voulait déjà la brûler en place publique en 1993 alors qu'elle était alors au sommet de sa carrière et régnait sur la jeunesse française. Mais aujourd’hui, ne pourrait-on pas la laisser en dehors de ces polémiques ?

Il y a, en 2025, bien d’autres combats à mener, bien d’autres torts à redresser que celui d’un clip oublié de 1988.

Rappelons que Dorothée a longtemps prôné la tolérance et le partage dans ses émissions.

Elle a mis en avant de nombreuses associations et participé à plusieurs projets caritatifs, comme les Chanteurs sans frontières contre la famine en Éthiopie.

Elle a soutenu le projet Action École, porté par Michel Berger, France Gall et Daniel Balavoine, toujours en faveur de la lutte contre la faim en Afrique.

On la retrouve aussi dans le collectif d’Alice Dona, aux côtés d’autres artistes, pour « La chanson de la vie », en soutien aux femmes du Tiers-Monde.


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